Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
5 mai 2013 7 05 /05 /mai /2013 17:46

 

343781-affiche-francaise-reprise-qui-a-peur-620x0-1.jpg

 

Qui a peur de Virginia Woolf? est un film de Mike Nichols réalisé en 1966, avec Elizabeth Taylor et Richard Burton.

 

Martha (Elizabeth Taylor) et George (Richard Burton) rentrent d'une soirée arrosée chez le père de Martha, doyen de l'université dans laquelle exerce George. Malgré l'heure tardive ils s'apprêtent à recevoir un couple formé par un jeune professeur de biologie et son épouse. A mesure que les verres se vident Martha et George se montrent de plus en plus cyniques et commencent à s'humilier mutuellement devant les deux invités.

 

Le film est adapté de la pièce éponyme dont le titre (Who's afraid of Virginia Woolf? en anglais) se veut un écho à la chanson des trois petits cochons "Who's afraid of the big bad wolf?". Cette pièce avait connu un très grand succès avant d'être adaptée par Mike Nichols. A la sortie du film le couple à l'écran formait également un couple à la ville. Tout19700731-r 640 600-b 1 D6D6D6-f jpg-q x-xxyxx comme dans le film, il traversait à cette époque une relation plus que tumultueuse. Nichols se serait servi de cette tension entre le couple pour la faire passer à l'écran. Par ailleurs les deux acteurs sont très à l'aise dans ces rôles tourmentés, que ce soit La Nuit de l'iguane pour Burton ou Soudain l'été dernier pour Taylor. Celle-ci aurait accepté de prendre 10 kilos pour les besoins du film. A noter, Qui a peur de Virginia Woolf? marque la quatrième participation du couple à l'écran après Hôtel international, Cléopâtre, puis Le Chevalier des sables 

Nominé huit fois aux Oscars en 1967 le film en remporta tout de même cinq dont celui de la meilleure actrice pour Elizabeth Taylor. Richard Burton aurait néanmoins largement mérité d'en recevoir un pour sa prestation. Avec Qui a peur de Virginia Woolf? Mike Nichols signe son premier long-métrage mais ne s'est pas arrêté en si bon chemin puisqu'il réalise l'année suivante l'excellent film Le Lauréat avec Dustin Hoffman. Le scénariste du film n'est pas non plus tout à fait un amateur: il s'agit d'Ernest Lehman, connu pour être l'auteur du scénario de La Mort aux trousses , un des classiques d'Alfred Hitchcock.

 

Psychodrame assez violent, ce huis clos infernal fait jaillir deux heures d'échanges crus mettant en scène les déballages conjugaux d'un médiocre professeur d'histoire (Burton) et d'une virago hystérico-alcoolique (Taylor). Cette histoire d'une névrose partagée -qui plus est en woolf2.jpgcouple- offre un scénario construit sur un mode progressif créant une tension de plus en plus vive entre les personnages, dont la seule préoccupation semble être de s'humilier. C'est magistralement exécuté puisque le malaise s'installe dès les premières minutes et ne fait que croître pendant 2h. Si le ressort dramatique est assez simple il n'en demeure pas moins efficace: jusqu'où s'enfoncera le couple dans son jeu malsain et destructeur? Comme pour tout jeu certaines règles semblent imposées aux participants (cf. l'enfant, au centre du film) sans qu'on en connaisse la teneur ni les limites. La tension est donc maximale pour le spectateur. Cette lutte à mort d'un couple déchiré fonctionne surtout grâce aux témoins qui assistent, bêtement impuissants, au pugilat qu'on leur impose ; la cruauté et le sadisme de Martha et George semblent décuplés par la présence du jeune couple idéalisé qui ne doute pas encore de son amour mais dont on sent bien qu'il s'interrogera bientôt sur la perspective de vieillir à deux. Celui-ci se révèle en effet peu à peu victime consentante du "jeu" en s'enfonçant à son tour dans le ressentiment (cf. notamment scène de la grossesse).

Cette oeuvre abrupte et suffocante n'a pas son pareil pour mettre mal à l'aise le spectateur-voyeur complice de ce déploiement de sadisme d'une grande noirceur mais dont il faut bien avouer qu'il est assez jouissif. Film d'excellente facture épatamment servi par le duo Burton/Taylor. Who's afraid of Virginia Woolf? - I am, George.

 

Note: 17/20

 

 


 


Partager cet article
Repost0
16 mai 2012 3 16 /05 /mai /2012 11:25

18866936

 

L'Homme qui aimait les femmes est un film de François Truffaut réalisé en 1977, avec pour acteur principal Charles Denner.

 

Bertrand Morane (Charles Denner) est un homme qui aime les femmes, toutes les femmes. La vision d’un genou, d’un mollet ou d’un mouvement féminin est sa seule raison de vivre. Il décide d'y consacrer un livre en s'inspirant de ses expériences personnelles.

 

Avant de confier le rôle principal de L'Homme qui aimait les femmes au comédien Charles Denner, François Truffaut l'a engagé pour des rôles secondaires dans La mariée était en noir en 1967 et Une belle fille comme moi en 1972. À partir d’un scénario original écrit par le cinéaste, François Truffaut exprimait en 1977 sa fervente admiration pour les femmes, qu’il a toujours aimées passionnément et placées au centre de son œuvre. L’homme qui aimait les femmes23466213.jpg n’est cependant pas l’histoire d’un séducteur. Le film raconte avec humour et gravité les tribulations d’un véritable esthète, qui a, certes, de nombreuses maîtresses, mais les aime toutes sincèrement, chacune pour une raison bien spécifique. Un simple geste, une image furtive d’un genou ou d’une épaule lui fait perdre la raison, et il n’a alors de cesse de rencontrer la dame et de la posséder. Double de François Truffaut dans le film, Charles Denner reprenait le nom de Bertrand Morane, qu’il portait déjà dans La mariée était en noir du même réalisateur. La personnalité très particulière de l’acteur et la pléiade de jolies actrices qui apparaissent à l’écran (Brigitte Fossey, Geneviève Fontanel, Nathalie Baye, etc.) confère à cette tragi-comédie un charme fou (source: fnac).

Certaines phrases de ce film sont savoureuses: "Les jambes des femmes sont des compas qui arpentent le monde en tout sens et qui lui donnent son équilibre et son harmonie" ou celle d'un docteur: "On ne peut pas faire l'amour du matin au soir, c'est pour cela qu'on a inventé le travail...". Comme souvent, Truffaut aime faire découvrir au spectateur une profession particulière, en l'occurrence celle d'écrivain et d'éditeur (on retrouve ce penchant dans plusieurs de ses films via la passion de Truffaut pour les maquettes). Il aime également développer un thème abordé dans d'autres films, à l'instar de sa passion pour les jambes, que Trintignant ne se lasse pas de regarder à travers un soupirail dans Vivement dimanche. Blake Edwards a fait un (mauvais) remake de ce film en 1983, qui fut traduit en français par le déplorable "L'homme à femmes" pour éviter la confusion avec le film de Truffaut. C'est n'avoir rien compris, car Denner campe l'inverse d'un "homme à femmes", d'un séducteur de supermarché dont le seul but serait de multiplier les conquêtes. C'est un homme "qui aime les femmes", jusque dans leurs petits défauts, qui aime leur présence ou au moins, leur vision.La différence est de taille. Savoureuse phrase de Denner: "Mais qu'est-ce qu'elles ont, toutes ces femmes? Qu'est-ce qu'elles ont de plus que toutes celles que je connais? Eh bien justement ce qu'elles ont de plus, c'est qu'elles sont des inconnues."

Truffaut déclara: "Nous avons écrit, Suzanne Schiffman, Michel Fermaud et moi, le scénario de L'homme qui aimait les femmes, à l'intention de Charles Denner et par admiration pour lui. J'ai demandé à Brigitte Fossey, Leslie Caron, Nelly Borgeaud, Geneviève Fontanel, Nathalie Baye, Sabine Glaser, Valérie Bonnier et de nombreuses belles Montpelliéraines d'être celles qu'il a tenues dans ses bras. Si une phrase pouvait servir de dénominateur commun aux amours de Bertrand, ce serait celle-ci, de Bruno Bettelheim dans "La Forteresse Vide" : "Il apparut que Joey n'avait jamais eu de succès auprès de sa mère".

 

L'excellent Charles Denner porte ce film grâce à son charisme et à sa voix délicieusement suave. Drôle et attendrissant dans son rapport aux femmes, inverse absolu de "l'homme à femmes". Le film ne contient aucune scène osée: l'instant érotique est, pour Morane, celui où ses yeux se fixent sur des jambes en mouvement. Après tumblr_krrwmuvIbn1qzbykto1_500.jpgavoir déclaré son amour à la littérature dans Fahrenheit 451 et son amour au cinéma dans La Nuit américaine, Truffaut s'attèle à son autre passion qui est celle des femmes. Grand séducteur, on peut trouver une analogie logique entre Bertrand Morane et François Truffaut. Celui-ci signe une réalisation de bonne facture, qui s'appuie en partie sur l'originalité de la construction narrative.

Le film a déchaîné les foudres féministes à sa sortie en 1977. Une critique de Pariscope le qualifia même  d'«inventaire de pièces détachées exhibant des veaux (les bonnes femmes) par pièces de quatorze». Critique  imbécile, car si on cherche absolument à dégager un message on pourrait aussi bien y voir un hommage  appuyé à la femme. Morane n'a rien d'un collectionneur de conquêtes, il aime les femmes -ou plutôt la femme- sous toutes ses formes. Davantage qu'un séducteur compulsif, c'est un grand enfant à la quête de l'éternel féminin, à travers le prisme de l'idéal maternel. Pour Morane/Truffaut, l'amour des femmes naît de la figure cruellement absente de la mère. Blessure profonde qui accorde une facette  tragique et joyeuse à ce tourbillon de conquêtes. 

On retrouve sensiblement ce thème (inversé) dans La Promesse de l'aube de Romain Gary, dont le titre s'analyse comme la promesse que la vie fait parfois en offrant dès le plus jeune âge un amour maternel passionné et inconditionnel : promesse non tenue, puisqu'on ne rencontre jamais plus une femme capable d'un tel amour. Place à cet admirable auteur, qui lui aussi aurait pu incarner cet "homme qui aimait les femmes" : « Avec l'amour maternel, la vie vous fait à l'aube une promesse qu'elle ne tient jamais. On est obligé ensuite de manger froid jusqu'à la fin de ses jours. Après cela, chaque fois qu'une femme vous prend dans ses bras et vous serre sur son cœur, ce ne sont que des condoléances. On revient toujours gueuler sur la tombe de sa mère comme un chien abandonné. Jamais plus, jamais plus, jamais plus. Des bras adorables se referment autour de votre cou et des lèvres très douces vous parlent d'amour, mais vous êtes au courant. Vous êtes passé à la source très tôt et vous avez tout bu. Lorsque la soif vous reprend, vous avez beau vous jeter de tous côtés, il n'y a plus de puits, il n'y a que des mirages. Vous avez fait, dès la première lueur de l'aube, une étude très serrée de l'amour et vous avez sur vous de la documentation. Je ne dis pas qu'il faille empêcher les mères d'aimer leurs petits. Je dis simplement qu'il vaut mieux que les mères aient encore quelqu'un d'autre à aimer. Si ma mère avait eu un amant, je n'aurais pas passé ma vie à mourir de soif auprès de chaque fontaine. Malheureusement pour moi, je me connais en vrais diamants » (Romain Gary, La Promesse de l'aube).


 

Note: 17/20

 

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
15 janvier 2012 7 15 /01 /janvier /2012 15:25

 

LES POUPEES DU DIABLE-copie-3

 

Les Poupées du diable est un film réalisé par Tod Browning en 1936.

 

Victime d'une machination de ses associés, le banquier Paul Lavond (Lionel Barrymore) passe 17 ans au bagne. Il parvient à s'échapper en compagnie de Marcel (Henry B. Walthall), un chimiste. Tous deux se réfugient chez Malita (Rafaela Ottiano), la femme de ce dernier. Lavond découvre qu'ils ont mis au point un procédé permettant de réduire les animaux à la taille d'une poupée. Bientôt, Marcel applique son invention aux êtres humains mais meurt prématurément, usé par les fatigues du bagne. Lavond voit dans cette opportunité le moyen de se venger de ses associés. Il part vivre à Paris sous un déguisement, se fait appeler "Madame Mandelip" et ouvre une boutique de poupées. Outre l'élaboration de sa vengeance il essaie de se rapprocher de sa fille (Maureen O'Sullivan), mais doit rester caché car celle-ci l'a toujours cru coupable et ne l'aime pas.

 

Tod Browning est surtout connu pour avoir tourné l'excellent Freaks, la monstrueuse parade (cf sur classiquesducinema) ou Dracula, avec Bela Lugosi. Il est considéré comme l'un des maîtres du cinéma fantastique des années 20 et 30. Il est l'auteur de plusieurs filmscin_poupees-diable_02.jpg cultes, mêlant horreur et humour noir, ce qui lui valu d'être surnommé " l'Edgar Poe du cinéma ". Le film est l'adaptation du roman " Brûle sorcière brûle " de Abraham Merritt. Pour l'adaptation au scénario, on trouve un certain... Erich von Stroheim, célèbre réalisateur (Folies de femmes, cf classiquesducinema, Les Rapaces) et acteur (La Grande illusion ou Sunset Boulevard, cf classiquesducinema). Cette réalisation est l'avant-dernière de Browning. Le producteur qui le soutenait à la MGM mourut peu après, le laissant sans soutien financier. Browning réalisa alors Miracles for sale puis "prit sa retraite".

En 1936, il n'était pas toujours aisé de créer des effets spéciaux qui fassent illusion. Dans le film, les victimes sont réduites à la taille d'une poupée. Browning demanda à la production de lui construire des décors gigantesques dans lesquels pouvaient évoluer ses acteurs tout en laissant croire qu'ils avaient été réduits. L'acteur principal, Lionel Barrymore, n'est autre que le grand-oncle de Drew Barrymore. Avec ce film, c'est sa quatrième collaboration à un film de Tod Browning. Quant à Maureen O'Sullivan, elle connut la gloire grâce à son rôle de Jane auprès de Tarzan à sept reprises entre 1932 et 1942. Même si le thème des homoncules et des poupées vivantes a déjà été illustré précédemment à l'écran, le film de Tod Browning constitue sans doute le premier long-métrage centré sur le sujet.

 

Réalisé 4 ans après Freaks,  Les Poupées du diable est un film plutôt rare du grand Tod Browning, qu'on pourrait les_poupees_du_diable_2.jpgapparenter à son chant du cygne. Par la suite, plus rien ou presque (Miracles for sale, 1939). Après avoir filmé les monstres de foire (Freaks), les vampires (Dracula), ou les auto-mutilés (L'Inconnu), Browning s'attaque ici aux homoncules en se penchant sur la science-fiction lilliputienne.

Dans cette réalisation épaulée par Erich von Stroheim, on passe en un clin d’œil du thriller (l’évasion dans les marais, puis l’enquête parisienne) à l’épouvante à la Franju (le laboratoire-chenil des deux savants fêlés, cf Les yeux sans visage). De fait, Browning opère un savant mélange des genres dans une atmosphère de poésie ténébreuse, quasi irréelle. C'est une réussite, même si on regrette que certaines sous-intrigues sentimentales prennent le pas sur l'aspect purement fantastique et horrifique du récit. Mais même dans ces petits travers Browning maîtrise sa copie: Lionel Barrymore nous fait passer du sourire à l'émotion, et la scène finale, sobre, est d'une belle tendresse. Les effets spéciaux sont réalistes pour l'époque et les moyens employés étonnants, puisque Browning fit appel à des décors gigantesques pour y faire évoluer ses acteurs-lilliputiens. L'ensemble présente donc une certaine cohérence dont on ne s'encombrait pas toujours dans les années 1930. Avec cet opus, "l'Edgar Poe du cinéma" prouve qu'il ne connaît pas d’équivalent comme cinéaste de la monstruosité. Ses Poupées du diable, sans être le meilleur Browning, reste néanmoins une assez belle réussite.

A voir, fatalement.

 

Note: 15/20

 

 

 


Partager cet article
Repost0
4 janvier 2012 3 04 /01 /janvier /2012 19:07

Folies de femmes

 

Folies de femmes est un film réalisé par Erich von Stroheim en 1922.

 

Le Comte russe Sergius Karamzin (Erich von Stroheim) et ses deux cousines les princesses Olga (Maud George) et Vera (Mae Bush) sont en exil dans une villa de Monte-Carlo. Sans un sou, ils se livrent au trafic de fausse monnaie. Lorsqu'ils apprennent que l'ambassadeur américain (Rudolph Christians) et son épouse (Miss Dupont) se trouvent à  Monte-Carlo, ils décident que le Comte séduira cette dernière afin de s'introduire dans ce milieu prestigieux et de pouvoir écouler les faux billets en toute tranquillité. Sergius Karamzin joue parfaitement son rôle, mais l'ambassadeur américain ne l'apprécie guère et se méfie de lui.

 

La durée de ce film varie selon les copies. A l'origine, von Stroheim avait fait un premier montage de plus de 8h, bien vite réduit malgré lui à 1h30 environ. foolish-wives.jpgAujourd'hui, la version la mieux équilibrée et la plus respectueuse du travail de von Stroheim dure environ 2h30. En 2008, le film est rentré dans le National Film Registry pour conservation à la Bibliothèque du Congrès aux États-Unis. Erich von Stroheim n'est autre que l'officier allemand dans La Grande illusion de Jean Renoir ou le majordome dans Sunset Boulevard de Billy Wilder. Vous trouverez ces deux films sur classiquesducinema.com.  A noter, pour ceux qui en doutaient encore: tourné en 1922, Folies de femmes est donc nécessairement un film muet. Il peut sembler inhabituellement long. Et pourtant, son autre réalisation Les Rapaces avoisine les 4h!

Avec Folies de femmes, Erich von Stroheim est considéré comme le premier maître de l'ironie de l'Histoire du cinéma. Après onze mois de tournage, lassé des rallonges de budget sans cesse réclamées de façon impérative, le producteur Carl Laemmle envoya son assistant, le jeune Irving Thalberg (22 ans) à Hollywood pour arrêter de force le tournage. C'est le premier film dont le budget fut supérieur à un million de dollars, un bon tiers de cette somme ayant été affectée à la reconstitution de la place centrale de Monte-Carlo dans le parc des Studios Universal. Dans ce décor, il fit évoluer jusqu’à quatorze mille figurants. Le film fut un succès mais Universal ne voulut plus faire travailler Erich von Stroheim, jugé incontrôlable.

Comme on l’imagine aisément, le film déclencha des vives réactions et protestations. On lui reprochait d’avilir la femme et d’encourager la dépravation. Le fait que la « victime » du comte soit une femme américaine occasionna des réactions épidermiques des exploitants de salles aux Etats-Unis qui parfois taillèrent dans le film ou changèrent certains intertitres : la jeune femme n’était ainsi plus présentée comme la femme d’un représentant du peuple américain. Rudolph Christians, l’acteur qui interprète le diplomate américain, mourut d’une pneumonie pendant le tournage. Il fut habilement remplacé par Robert Edeson dans certaines scènes. Il est assez difficile de dire exactement lesquelles (source: l'oeil sur l'écran).

 

Folies de femmes est sorti la même année que Nosferatu de Murnau. Mais si ce dernier a terriblement vieilli, ce n'est pas le cas pour la réalisation de von Stroheim. Contre toute attente, les 2h30 de ce film muet passent comme 18857733.jpg-r_760_x-f_jpg-q_x-20070907_052827.jpgune lettre à la poste. Pour cause, il nous offre une réalisation parfaite, bourrée de charme mais sans pitié pour la haute société d'entre-deux-guerres. Les gentlemen, oisifs et engoncés dans leurs superbes uniformes qui ne signifient plus rien sont si caricaturaux qu'ils valurent à von Stroheim le titre de premier maître de l'ironie dans l'Histoire du cinéma. Folies de femmes est l'un des films majeurs de ce réalisateur, qui s'y impliqua entièrement puisqu'il est à la fois auteur du scénario, metteur en scène et acteur principal. Sa prestation d'acteur est bluffante. Drôle, cynique, risible, immoral: il porte le film à lui tout seul dans un climat très particulier qui mêle grand luxe et décadence. Le film est en quelque sorte marqué par la démesure et la mégalomanie de son auteur, mais aussi par sa personnalité, ce qui a pour effet de lui donner une âme: 90 ans après, Folies de femmes se regarde toujours avec plaisir.

Pour l'anecdote, aucun film de von Stroheim n'est visible tel qu'il l'imaginait à l'origine. Trop longs, tournés avec un excessif goût du détail, ils ont tous été coupés, mutilés voire censurés. C'est notamment le cas pour Folies de femmes. Mais la version d'Arthur Penning, considérablement réduite par rapport au premier montage (d'environ 8h à 2h20) est néanmoins parfaitement équilibrée. C'est, paraît-il, la plus respectueuse des intentions de von Stroheim, à voir en priorité donc.

A noter: ne regardez pas les résumés proposés sur internet (wikipédia, allociné), ils dévoilent  presque toujours -et bien maladroitement- une partie de l'intrigue!

Conclusion: mordant et soigné, très bien interprété par le magistral Erich von Stroheim lui-même, ce film muet est un petit bijou.

 

Note: 18/20

 

 

 

 

 


Partager cet article
Repost0
30 novembre 2010 2 30 /11 /novembre /2010 02:00

 

julien-guiomar.jpg

 

 JULIEN GUIOMAR (1928 - 2010)

 

 

Acteur incontournable, Julien Guiomar a joué dans plus de soixante films et dans des dizaines de pièces de théâtre.

Reconnaissable à son physique imposant et à sa voix de stentor, c'était un des grands seconds rôles du cinéma français. Aussi à l'aise dans les comédies que dans Le Songe d'une nuit d'été de Shakespeare, l'acteur s'est fait un nom en incarnant un colonel grec dans Z de Costa-Gavras (1969). La même année, il jouait le curé espagnol dans La Voie lactée de Luis Buñuel. Par la suite, il fut également le colonel Vincent dans Papy fait de la résistance de Jean-Marie Poiré (1983), le commissaire Bloret dans Les Ripoux (1984) et Jacques Tricatel dans L'Aile ou la Cuisse (1976), deux films de Claude Zidi.

 

Guiomar, c'est d'abord une présence: une gueule associée à une gestuelle théâtrale inimitable.

Mais c'est surtout cette voix rauque et puissante qui contribua tant à son succès et qui rendait ses colères redoutables.

 

Guiomar a cotoyé les plus grands (Belmondo, Delon, Gabin, Ventura, de Funès, Noiret, etc) . Bien que cantonné aux seconds rôles, c'était un acteur populaire très talentueux. On ne tourne pas par hasard avec Costa-Gavras, Buñuel, Rappeneau, Sautet, Malle, Zidi, Broca, Granier-Deferre, Resnais ou Lautner.

 

Hommage-a-Julien-Guiomar_galleryphoto_home_std.jpg

 

En son honneur, petit florilège d'extraits de ses prestations les plus marquantes.

 



On se souvient de l'ignoble Tricatel, chantre de la restauration rapide, et ennemi de Louis de Funès dans L'aile ou la cuisse (1976) de Claude Zidi:

 

http://www.youtube.com/watch?v=Ens-6N45FCs

 


L'abbé La Margelle, chef des voleurs au côté de Jean-Paul Belmondo dans Le Voleur (1967) de Louis Malle:





Oncle dépressif de Jean-Paul Belmondo dans l'Incorrigible (1975) de Broca:



Colonel de police corrompu, il joue aux côtés d'Yves Montand et de Charles Denner dans Z (1969) de Costa-Gavras:

 



Résistant dans Papy fait de la résistance (1983) de Jean-Marie Poiré:

http://www.youtube.com/watch?v=Q3BPGm8aHgQ

 


Liste de ses films

horse-1970-05-g1966 : Le Roi de cœur, de Philippe de Broca : Mgr Marguerite
1967 : Ballade pour un chien, de Gérard Vergez : Robin
1967 : Le Voleur, de Louis Malle : l'abbé La Margelle
1967 : Toutes folles de lui, de Norbert Carbonnaux : Antoine
1968 : Pour un amour lointain, d'Edmond Séchan : Maxime
1968 : La Louve solitaire, d'Édouard Logereau : Durieux
1969 : La Fiancée du pirate, de Nelly Kaplan : le Duc
1969 : Z, de Costa-Gavras : le colonel
1969 : L'Auvergnat et l'autobus, de Guy Lefranc : Me Valentin Chanterive
1969 : La Voie lactée, de Luis Buñuel : le curé espagnol
1970 : La Horse, de Pierre Granier-Deferre : le commissaire
1970 : Borsalino, de Jacques Deray : Simon Boccace
1971 : Les Mariés de l'an II, de Jean-Paul Rappeneau
1971 : Doucement les basses, de Jacques Deray : Francisco
1972 : Décembre, de Mohammed Lakhdar-Hamina : le général Beaumont
1972 : La Violenza: Quinto potere, de Florestano Vancini : commissaire Golino
1972 : L'Étrangleur, de Paul Vecchiali : l'inspecteur Simon
1973 : La Raison du plus fou, de Raymond Devos et François Reichenbach : le patron du restaurant
1973 : La Proprietà non è più un furto, d'Elio Petri : le directeur de la banque
1973 : L'Histoire très bonne et très joyeuse de Colinot trousse-chemise, de Nina Companeez : le mari de Rosemonde
1974 : Tendre Dracula, de Pierre Grunstein : le producteur
1974 : Dites-le avec des fleurs, de Pierre Grimblat : le docteur Comolli
1974 : La Moutarde me monte au nez, de Claude Zidi : Albert Renaudin
1974 : Bons baisers... à lundi, de Michel Audiard : Poudevigne
1975 : Aloïse, de Liliane de Kermadec : le directeur de théâtre
1975 : Une baleine qui avait mal aux dents, de Jacques Bral : Julien
1975 : Section spéciale, de Costa-Gavras : le substitut
1975 : Souvenirs d'en France, d'André Téchiné : Victor
1975 : Adieu poulet, de Pierre Granier-Deferre : Ledoux
1975 : L'Incorrigible, de Philippe de Broca : Camille
1976 : Mado, de Claude Sautet : Lépidon
1976 : L'Aile ou la Cuisse, de Claude Zidi : Jacques Tricatel
1976 : Barocco, d'André Téchiné : Gauthier
1977 : L'Animal, de Claude Zidi : Fechner
1977 : Mort d'un pourri, de Georges Lautner : Fondari
1978 : La Zizanie, de Claude Zidi : Dr Landry
1978 : Ils sont fous ces sorciers, de Georges Lautner : Stumph-Bachelier, le président
1978 : Les Ringards, de Robert Pouret : Jeannot Bidart, dit "La presse"
1979 : Je vous ferai aimer la vie, de Serge Korber : Dr. Soltier
1979 : Cher papa (Caro papà), de Dino Risi : Parrella
1979 : Milo-Milo, de Nicos Perakis : Louis
1980 : Je suis photogénique (Sono fotogenico), de Dino Risi : Carlo Simoni
1980 : Le Bar du téléphone, de Claude Barrois : Antoine Bini
1980 : Inspecteur la Bavure, de Claude Zidi : Vermillot
1981 : Est-ce bien raisonnable ?, de Georges Lautner : Raymond Volfoni
1983 : Un chien dans un jeu de quilles, de Bernard Guillou : Alexandre
1983 : Équateur, de Serge Gainsbourg : Bouilloux
1983 : Papy fait de la résistance, de Jean-Marie Poiré : colonel Vincent
1984 : Carmen, de Francesco Rosi : Lillas Pastia
1984 : Les Ripoux, de Claude Zidi : commissaire Bloret
1985 : L'Arbre sous la mer, de Philippe Muyl : Thomas
1985 : Le Matou, de Jean Beaudin : Aurelien Picquot
1986 : Le Débutant, de Daniel Janneau : Lucien Berger
1987 : Flag, de Jacques Santi : Léon Terzakian
1987 : Bahia de tous les saints (Jubiabá), de Nelson Pereira dos Santos : Luigi
1987 : Dernier été à Tanger, d'Alexandre Arcady : commissaire Gomez
1987 : Les Deux crocodiles, de Joël Séria : Julien Derouineau
1988 : Terre sacrée, d'Emilio Pacull
1989 : African Timber, de Peter F. Bringmann : Girolles
1989 : Astérix et le coup du menhir, de Philippe Grimond (voix)
1990 : Plein fer, de Josée Dayan : Fabiani
1991 : Robinson et compagnie, de Jacques Colombat (voix)
1992 : Léolo, de Jean-Claude Lauzon : Grand-Père
1993 : Je m'appelle Victor, de Guy Jacques : Emile
1997 : Violetta la reine de la moto, de Guy Jacques : Corneille
1997 : Que la lumière soit !, d'Arthur Joffé : Dieu le père
2001 : J'ai faim !!!, de Florence Quentin : Guyomard
2003 : Clandestino, de Paule Muxel : Jean

Partager cet article
Repost0
23 novembre 2010 2 23 /11 /novembre /2010 02:08

Nous apprenons avec une profonde tristesse que l'excellent acteur Julien Guiomar n'est plus.

Les classiques du cinéma saluent cet excellent acteur, qui comptait parmi les plus grands.

Un hommage lui sera très bientôt rendu.

 

 

horse-1970-03-g.jpg

 

 

Partager cet article
Repost0
30 octobre 2010 6 30 /10 /octobre /2010 14:00

 

19254605.jpg-r_760_x-f_jpg-q_x-20100223_051047.jpg

 

Johnny s'en va-t-en guerre est un film réalisé par Dalton Trumbo en 1971.

 

Johnny (Timothy Bottoms) est un jeune soldat engagé volontaire de la Première Guerre mondiale. Grièvement blessé par un obus, amputé des membres et d'une partie du visage, il survit néanmoins suite à l'acharnement d'un médecin qui le croit dans le coma et l'utilise en tant que cobaye pour faire progresser la médecine. Mais celui-ci ignore que Johnny a gardé un cerveau en parfait état de fonctionnement et reste conscient. Isolé dans une chambre d'hôpital, il se remémore son histoire et tente désespérément de communiquer. Seule une jeune et belle infirmière (Diane Varsi) se montre sensible à son sort.

 

Le film Johnny s'en va-t-en guerre est tiré du livre éponyme de son réalisateur, Dalton Trumbo. Ce livre fut publié pour vlcsnap-8872149.jpgla première fois en 1939, seulement deux jours après le début de la Seconde Guerre mondiale et il devint rapidement célèbre par son caractère ouvertement anti-militariste. Dalton Trumbo, écrivain et scénariste, a écrit pour les plus grands réalisateurs: Frank Capra, Otto Preminger, George Roy Hill et même Stanley Kubrick avec lequel il a coécrit le scénario de Spartacus en 1960. Le clip de la chanson "One" du groupe de hard-rock Metallica reprend des extraits du film Johnny s'en va-t-en guerre. La chanson est elle-même inspirée du film.

N'ayant jamais réalisé de films, Dalton Trumbo pense confier l'adaptation de son roman à son ami Luis Buñuel. Refus de ce dernier, qui apportera néanmoins sa contribution en collaborant à certains plans. Lorsque le roman de Dalton Trumbo sort en 1939, il fait écho à la Seconde Guerre mondiale. De même, lorsque le film sort en 1971, il fait écho à la Guerre du Vietnam: la sortie du film et sa reconnaissance au festival de Cannes eurent une seconde résonance avec l'actualité. Les divers mouvements pacifistes et antimilitaristes des années 1970 firent de Johnny s'en va-t-en guerre une œuvre majeure dans laquelle il convient de voir l'un des plus violents réquisitoires de la littérature et du cinéma américain contre l'absurdité de toutes les guerres (source: wikipédia). A l'image du Soldat bleu (sur le génocide indien), Johnny s'en va-t-en guerre fait en effet partie de ces films corrosifs qui offrent une autre image de la guerre. Présenté à Cannes en 1971 en compétition officielle, Johnny s'en va-t-en guerre a remporté le Prix de la critique international et le Grand Prix du Jury.

 

vlcsnap-8871331

 

 

Film résolument anti-militariste, jamais l'absurdité de la   guerre n'a trouvé meilleure  illustration que dans ce réquisitoire de Trumbo.

Johnny s'en va-t-en guerre est la grande réussite d'un réalisateur débutant de 66 ans, scénariste réputé (Exodus,  Papillon), poursuivi pendant les heures noires du maccarthysme   comme l'un des "dix  d'Hollywood". Cette  vlcsnap-8867069.jpgadaptation de son  propre livre est l'une des plus impitoyables dénonciations de la folie destructrice de la guerre.  Écrabouillé  par un obus sur un champ de bataille, Johnny est une épave humaine clouée sur un lit de souffrances qui implore qu'on l'achève. Le film est dur, moins en raison des images -on ne voit pas une goutte de sang-  que de la torture mentale du personnage principal, amputé des  quatre membres et ne possédant plus q'un sens: le toucher.

Se revendiquant comme un concentré d'humanisme, la vision de Trumbo est naïve et a tendance à exploiter le pathos de la situation. Mais c'est également la force de ce grand film, dur et poignant. L’horreur psychologique atteint ici son apogée. Pour renforcer le malaise, Trumbo altère les repères du spectateur en brouillant les souvenirs et les rêves de Johnny, offrant ainsi quelques scènes assez surréalistes (la rencontre de Johnny avec un Jésus Christ totalement impuissant, interprété par Donald Sutherland). D'un point de vue technique, soulignons également l'audacieuse structure narrative: souvenirs et rêves de Johnny en couleur, dure réalité du mutilé de guerre en noir et blanc.

Terrible manifeste d'une noirceur radicale, à voir sans délai (et absolument en VO).

 

Note: 16/20

 

 

 

Partager cet article
Repost0
27 septembre 2010 1 27 /09 /septembre /2010 21:50

 

Que_la_bete_meure_cine_grande.jpg

 

Que la bête meure est un film réalisé en 1969 par Claude Chabrol, avec Michel Duchaussoy et Jean Yanne.

 

Charles Thénier (Michel Duchaussoy) est un écrivain pour enfants qui décide de venger son fils, mort sous les roues d'un chauffard. Bientôt, son enquête le mène jusqu'au coupable, un garagiste nommé Paul Decourt (Jean Yanne). Intrigué par ce personnage, il devient un intime de la famille et découvre un homme abject,  haï de tous.

 

Que La bête meure est une adaptation du roman de Nicholas Blake.44751.jpg

L'histoire tourne autour d'un père fou de douleur qui entend se venger du lâche assassin de son fils («Je vais tuer un homme. Je ne connais ni son nom, ni son adresse, ni son apparence. Mais je vais le trouver et le tuer.»).

Michel Duchaussoy, remarqué avec Jeu de massacre obtient ici son second premier rôle, tandis que Jean Yanne, remarqué ici en tant que second rôle, avait obtenu auparavant l'une de ses premières grandes interprétations dans Week-end de Jean-Luc Godard. Selon Eric Libiot, Que la bête meure, "une des oeuvres phares de Claude Chabrol", n'a pas pris une ride, la confrontation entre un père et le meurtrier de son fils est un "modèle du genre". Le face-à-face entre les deux hommes est féroce et complexe, nuancé d'une réflexion morale sur la légitimité de la vengeance et de la condamnation (Source: Wikipédia). Les critiques considèrent Que la bête meure comme le chef-d’œuvre chabrolien, celui-là même qui permit au cinéaste et à Jean Yanne de se retrouver peu de temps après pour un autre sommet du genre : Le boucher (1970).

Scène à retenir: le repas familial, véritable jeu de massacre dans lequel Jean Yanne s'en donne à coeur joie (cf extrait).

 

Sans tomber dans l'hommage dégoulinant, il y a un peu de Hitchcock et de Fritz Lang dans ce Chabrol. Hitchcock  pour la mise en scène au cordeau, faite de silence et   d'atmosphère pesante, Lang pour le thème de la culpabilité QueLaBeteMeure1.jpgmise à nu. Mais il y a aussi et surtout beaucoup de Chabrol: l'ambiguïté dont il est si friand dans ses autres réalisations prédomine, au point que si les personnages semblent caricaturaux de prime abord (le père qui veut venger son fils, l'assassin qui n'est qu'un salaud), le réalisateur se hâte ensuite de brouiller les pistes. Le père est manipulateur, alors que l'ignoble Jean Yanne s'avère être le seul personnage vraiment franc dans cette petite famille bourgeoise. Chabrol amène ainsi le spectateur à reconsidérer sa vision formatée des choses et des gens en opèrant une remise en question systématique qui conduit le spectateur de la plus évidente certitude (un père se doit de venger la mort de son fils) au questionnement le plus opposé (le "justicier" est-il fondamentalement différent du criminel qu'il traque?). Ce n'est pas un hasard si le film se clôt par cette phrase  : « Il existe un chant sérieux de Brahms qui paraphrase l'Ecclésiaste : "Il faut que la bête meure ; mais l'homme aussi. L'un et l'autre doivent mourir." ».

Mention spéciale à Jean Yanne, qui incarne parfaitement cette "bête" sans scrupule, parfois plus animal qu'humain. Ce superbe acteur contribue grandement à la réussite du film.

Un seul mot à retenir pour qualifier cette oeuvre: inconfortable. Et c'est trop rare, au cinéma, pour ne pas être applaudi.

 

 

Note: 15/20


 

Partager cet article
Repost0
24 août 2010 2 24 /08 /août /2010 10:23

 

affiche.jpg

 

Rome, ville ouverte est un film réalisé par Roberto Rossellini en 1945.

 

Italie, hiver 1944. Rome est occupée par les Allemands. Un chef de comité de Libération, Manfredi (Marcello Pagliero), se réfugie chez Pina (Anna Magnani), une jeune veuve qui vit avec son fils Marcello (Vito Annicchiarrco) et qui doit épouser Francesco (Francesco Grandjacquet), le père de l'enfant qu'elle porte. Afin de l'aider à se cacher, Pina met Manfredi en contact avec le curé de la paroisse Don Pietro Pellegrini (Aldo Fabrizi). Pendant ce temps, les Allemands ne restent pas inactifs et font tout ce qu'ils peuvent pour mettre la main sur ce noyau de la résistance.   

 

Rome, ville ouverte est considéré comme le point de départ d'une révolution esthétique au cinéma: c'est le premier film majeur du néo-réalisme italien. Tourné en 1945, il fait exploser les conventions du cinéma mussolinien des années quarante. Le critique André Bazin définissait le néo-réalisme comme "[...] une description globale de la réalité par une Sans-titre-1-copie-3.jpgconscience globale […] qui se refuse par définition à l'analyse politique, morale, psychologique, logique, sociale ou tout ce que vous voudrez des personnages et de leur action. Il considère la réalité comme un bloc, non pas certes incompréhensible mais indissociable".

A ce titre en effet, il est légitime d'utiliser cette expression pour qualifier Rome, ville ouverte.  Ajoutons que cette œuvre de Rossellini pourrait presque s'apparenter au document historique grâce à son réalisme, renforcé par le très petit budget dont disposait le réalisateur. La liberté des mouvements de la caméra, l'authenticité des personnages à peine glorifiés, et le mode de narration inédit en  font une oeuvre de grand intérêt. 

Voici un témoignage très intéressant de Rossellini: "Nous avons commencé notre film deux mois seulement après la libération de Rome, malgré la pénurie de pellicule. Nous avons tourné dans les décors naturels où s'étaient passés les évènements que nous reconstituions. Pour entreprendre mon film j'ai vendu mon lit puis une commode et une armoire à glace. [...] Rome, ville ouverte fut à l'origine un film muet, non par goût, mais par nécessité. La pellicule coûtait 60 lires le mètre au marché noir, et si nous avions dû enregistrer le son, il nous aurait fallu dépenser pour chaque scène des lires supplémentaires. Et puis les autorités alliées nous avaient seulement délivré un permis de tournage pour un documentaire. Quand le film fut monté et terminé, les acteurs se sont doublés eux-mêmes." 

Comme le soulignait Georges Sadoul, "ce fut pour une part l'exceptionnelle présence de la Magnani (Anna Magnani), tragédienne donnant un nouveau visage à l'Italie, qui imposa ce film au monde, tout surpris de voir, au lieu des parades en chemise noire ou des grandes mises en scène romaines, "les gens de la rue", les femmes, les enfants, devenir les vrais protagonistes de l'histoire.  

  roma-citta-photo-main1.jpg


Témoignage brut et sans concession de la  résistance du peuple romain face à l'occupant allemand, Rome, ville  ouverte est animé d'un indiscutable   souci d'authenticité.   S'inspirant de faits réels, tourné à chaud dans un style   Sans-titre-3.jpgdocumentaire débarassé des oripeaux mélodramatiques traditionnels, ce film est considéré comme l'acte de naissance du courant "néo-réaliste", ouvrant la voie à un des courants majeurs du cinéma mondial d'après-guerre.    

Dans le contexte d'une Italie fragilisée par la guerre et le régime de Mussolini, après dix ans de mainmise du régime fasciste sur le cinéma italien, cette oeuvre de Rossellini détone. Son  importance fut immense. Et, comme l'affirma un jour Rossellini en plaisantant: "Rome, ville ouverte fit plus que  tous les discours de notre Ministre des affaires étrangères pour que l'Italie retrouve sa place dans le concert des nations."  Outre son rôle historique, ce film est LA référence ayant contribué à créer un nouveau modèle esthétique pour les cinéastes d'après-guerre désireux de donner une image vivante de l'histoire et de la  société.  Place, une fois encore, à Sans titre 4Rossellini pour qualifier cette petite révolution: "Le néo-réalisme consiste à suivre un être, avec amour, dans toutes  ses découvertes, toutes ses impressions. Il est un être tout petit au-dessous de quelque chose qui le domine et qui,  d'un coup, le frappera effroyablement au moment précis où il se trouve librement dans le monde, sans s'attendre à quoi que ce soit. Ce qui est important pour moi, c'est cette attente."     

Malgré une première partie un peu lente soulignons, à l'actif de cette réalisation, la sobriété des scènes: rien n'est superflu ; on scrutera vainement l'emphase et les effets de manche  (on songe, à ce titre, à Robert Bresson) . Même les scènes qui se prêtent à ce genre de "dérives" se gardent d'y céder (la torture du chef des résistants, le suicide d'un prisonnier, qu'on ne voit pas mais que tout préludait, etc.). Considéré comme une "actualité reconstituée" de par sa proximité chronologique avec les faits abordés (tourné début 1945!), Rome, ville ouverte est un film important à plus d'un titre, que tout pousse à regarder.

 

Note: 17/20

 

 

Partager cet article
Repost0
8 août 2010 7 08 /08 /août /2010 16:03

 

affiche_Lumieres_de_la_ville_1930_2.jpg

 

Les Lumières de la ville est un film réalisé par Charlie Chaplin en 1931, dans lequel celui-ci tient le rôle principal.

 

Un vagabond (Charlie Chaplin) erre dans les rues d'un centre ville, sans but, quand il apercoit une jeune et belle fleuriste aveugle (Virginia Cherrill). Troublé, le vagabond recherche la solitude au bord du fleuve. Mais il est interrompu dans ses rêveries par un millionnaire (Harry Myers) qu'il sauve du suicide. Ensemble, ils font la noce toute la nuit, mais au petit matin le millionnaire ne se souvient de rien et se montre nettement moins généreux. Le vagabond déambule alors à nouveau dans les rues. Désespéré de ne plus voir la jeune femme,il apprend qu'elle est tombée malade, et se résout alors à demander de l'aide au millionnaire.

 

La production du film s'étale sur trois ans, dont 534 jours de tournage. La scène au cours de laquelle la fleuriste 1236978765_charlie_chaplin__les_lumiere_de_la_ville__1931.jpgaveugle prend le vagabond pour un homme riche a notamment nécessité rien de moins qu'un record de 324 prises, pour ne trouver sa version définitive qu'au dernier jour de tournage. La richesse n'étant pas a priori un état perceptible par d'autres sens que la vue, Chaplin a en effet dû déployer tous les ressorts de son talent de metteur en scène pour imaginer un concours de circonstances suffisamment crédible. La scène de l'élévateur devant le magasin d'antiquité a été préférée au montage à une autre scène au cours de laquelle le vagabond joue avec un morceau de bois coincé dans une grille d'aération sans parvenir à l'y glisser. La foule curieuse s'amasse bientôt autour de lui et un employé derrière sa vitrine, très docte, lui explique par gestes, la méthode la plus rationnelle pour faire tomber le bout de bois. Toute la séquence de boxe est inspirée du court métrage Charlot boxeur. L'attente dans le vestiaire durant laquelle le vagabond prend conscience de la violence des combats en voyant revenir les perdants inanimés et le combat lui-même, lorsqu'il tire parti de tous les moyens qui sont mis à sa disposition (l'arbitre, les cordes ...) pour éviter les coups de son adversaire, figurent déjà dans ce précédent film de Chaplin. La séquence est néanmoins enrichie de nouveaux gags ainsi que d'une intrigue et d'une mise en scène plus soignées. (Source informations: wikipédia). Le désintérêt de Virginia Cherrill pour son rôle de fleuriste pousse Chaplin à renvoyer l'actrice. Après des essais catastrophiques avec Georgia Hale (personnage féminin principal de La Ruée vers l'Or), le cinéaste engage à nouveau l'actrice renvoyée... contre une hausse de salaire! (Source: Allocine)

Séquences à retenir: l'inauguration solennelle de la statue de la prospérité, sur laquelle dort Charlot le vagabond. La rencontre avec la fleuriste. Les soirées de Charlot et du millionnaire, ivres. La scène où Charlot sort de la Rolls du millionnaire et se précipite sur un cigare jeté à terre, devant les yeux éberlués d'un vagabond.

 

Sans-titre-2.jpgPersuadé que la parole allait gâcher la beauté du cinéma, Charlie Chaplin, infatigable défenseur du mime, déplorait l'arrivée du son et décida de l'ignorer. En 1928, lors de l'avènement révolutionnaire de ce nouveau moyen technique, c'était prendre beaucoup de risques. D'autant que le tournage s'est terminé en 1930, et que le film ne fut présenté qu'en 1931. Les Lumières de la ville a été tourné dans une attitude de défi, et fut présenté comme une "comédie romanesque en pantomime". Ce qui n'empêcha pas Charlie Chaplin d'y ajouter des effets sonores et de composer sa propre partition (il dirigea même l'orchestre). Ainsi que de s'improviser distributeur: il engagea alors son argent pour louer une salle à New-York. C’est donc par l’image que passe la majorité des gags du film, Chaplin déployant toute la palette de son génie burlesque. D’un début en fanfare où, sur une statue, il livre un génial numéro de pantomime à une scène de boxe aujourd'hui connue de tous, les images frappent plus que le son n'aurait su le faire. Monument d'équilibre entre le rire et les larmes, cette histoire simple est racontée dans un style dépouillé, celui des grands classiques. Mais il ne faut pas s'y tromper: chaque détail a son importance, et résulte d'un long et fastidieux travail d'analyse (324 prises pour la scène de la rencontre avec la fleuriste! Un métrage de pellicule égal à cent ou cent cinquante fois le métrage du film définitif!). Une fois de plus, et peut-être plus que jamais, Chaplin touche et séduit, malgré un comique de répétition parfois lassant.

 

Note: 18/20


  Le vagabond et la fleuriste

Le vagabond et le millionnaire

 


Partager cet article
Repost0